Témoignage abstention : “Même avec un vote électronique, je n’irai pas cliquer. Je ne veux pas voter pour des promesses, mais pour des actions.”

Juil 11, 2020 | Politique, Société | 0 commentaires

Temps de lecture : 2 minutes
Sonia, Professeur d’anglais et français langue étrangère, 38 ans
« J’avais entamé des études de cinéma, médias et communication. Puis j’ai appris sur le tas le métier de professeur à l’étranger et j’ai tout de suite adoré. Au lycée, j’étais une élève rebelle, j’avais peu de difficultés, mais je ne supportais pas le cadre strict de l’école. Même aujourd’hui en tant que professeur, je le trouve trop rigide.
Je suis quelqu’un de très créatif, j’ai besoin d’être sur tous les plans, c’est pourquoi j’ai beaucoup de projets (écriture, médias, réalisation).
La dernière fois que j’ai voté, c’était au premier tour des présidentielles en 2012, c’était pour Bayrou, pour ses positions sur la Palestine et parce qu’il me semblait être le candidat le plus « moral » de cette élection. Au 2ème tour, je me suis abstenue car il était impensable de voter Sarkozy ou Hollande pour moi.
Je ne vais jamais voter blanc, car ces bulletins ne sont pas pris en compte et je ne vois pas l’intérêt de me déplacer pour ça.
Faut vraiment refaire toutes les institutions, rien ne va. Je le vois en tant que prof. Par exemple, lorsque j’enseignais en Jordanie, je me sentais vraiment impliquée dans la réussite de l’élève, alors qu’en France on va juste me demander d’être assidue, mais pas de m’intéresser à mes élèves.
J’ai l’impression d’avoir régressé en tant que prof tellement l’école est ghettoïsée. Je n’ai toujours pas Internet dans ma classe, je suis mal payée en tant que contractuelle (et souvent en retard), on me restreint même sur le nombre de feutres que j’utilise ! On se sent vraiment abandonné par l’Etat dans le 93. Ma fille qui est au collège a perdu le niveau d’anglais qu’elle avait lorsqu’on vivait à l’étranger. J’ai aussi l’impression d’avoir perdu mon niveau de vie, et de mon « standing » en revenant en France.  Je ne me reconnais plus dans la France dans laquelle j’ai grandi. J’ai peur pour l’avenir de mes enfants, je pense qu’ils ne pourront pas grandir en paix. Trop d’injustices, et je pense que ça n’ira pas en s’améliorant. En plus, on a complètement perdu notre crédibilité à l’international.
J’irai voter le jour où il y aura un candidat vraiment représentatif du peuple, où nous, les bi-nationaux, ne seront plus considérés comme des citoyens de seconde zone. J’aimerais que mon pays soit plus ouvert, qu’il accepte l’Autre comme une richesse, et non comme un parasite. Je ne supporte la division qu’on nous inflige afin de camoufler les vrais problèmes. Il nous faut un super-héros.
Pour moi, ceux qui rejettent la faute sur les abstentionnistes sont tout simplement des connards. C’est trop facile de nous culpabiliser sans une once d’empathie, quand on a sa place au chaud.
Même avec un vote électronique, je n’irai pas cliquer. Je ne veux pas voter pour des promesses, mais pour des actions. J’ai envie de dire à nos politiques : « fais d’abord, et après je vote pour toi ».  Le problème, c’est qu’ils n’osent plus agir. J’en ai marre qu’il n’y ait jamais de référendum sur les questions importantes, et de subir leurs interventions télévisées pour justifier leurs bêtises. Je ne veux pas les voir à la télé, mais qu’on me demande mon avis.
En tant que militante, je suis conscientisée, mais malheureusement, le citoyen lambda, souvent mal informé, est lobotomisé par ces interventions stériles. J’ai beaucoup milité, dans des événements, structures et collectifs divers. »
 
 
 

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