Ce qu’on appelle « culture du viol » correspond à la fois aux clichés entourant la question du viol, et et aux moyens mis en œuvre pour faire reposer la responsabilité du viol sur la victime. Cette « culture du viol » très présente dans nos sociétés occidentales, entretient l’idée reçue plus ou moins consciente que le corps des femmes est à disposition des hommes, et de cette manière, encourage les viols et agressions sexuelles.
La culture du viol se base sur l’idée reçue que la plupart des viols seraient commis par des inconnus de la victime, tard dans la nuit dans une ruelle sombre. Dans ce scénario, le violeur est souvent peu attirant, et atteint d’une pathologie mentale. Le problème de cette image du viol, c’est que non seulement elle ne correspond pas à la réalité de la majorité des viols, ce qui rend le viol encore plus difficile à identifier, mais en plus, elle fait peser la responsabilité du viol entièrement sur la victime. D’après ce cliché, il serait « facile » d’éviter les viols ; il suffirait de ne pas s’aventurer non accompagnée à heure tardive dans des endroits isolés. Ceci voudrait dire que l’espace public, passé une certaine heure, n’appartiendrait plus aux femmes, et qu’on ne peut pas reprocher à un violeur de disposer du corps d’une femme dans ces conditions. On laisse croire aussi que la sexualité masculine serait impossible à contenir, et que c’est aux femmes de ne pas se rendre disponibles aux hommes car considérés comme dangereux, et non aux hommes de se contrôler.
En donnant l’injonction aux femmes de ne pas se rendre vulnérables face aux violeurs, et donc disponibles sexuellement face aux hommes, on exerce ainsi un contrôle sur leur comportement sexuel. En effet, on diffuse ainsi l’idée que seuls les hommes ont du désir sexuel, et que ce désir est dangereux pour les femmes ; donc si elles veulent éviter le viol, elles doivent se protéger du désir masculin en évitant de le provoquer. Pire, une femme qui revendiquerait avoir du désir sexuel serait perçue comme une femme de mauvaise vie, qui mériterait presque d’être violée. De cette manière, le « slutshaming », qui consiste à humilier une femme en fonction de son comportement sexuel, contribue pleinement à la culture du viol.
Seulement, voilà, les femmes sont aussi soumises à des injonctions contradictoires ; d’un côté on les somme de ne pas céder au désir des hommes, et de l’autre, on considère par défaut que leur corps est à disposition des hommes. C’est pourquoi, le concept de la « friendzone », qui laisse le mauvais rôle aux femmes qui ne laissent pas leur corps à disposition des hommes qui se comporteraient pourtant correctement avec elles, est un concept patriarcal, qui lui aussi, entretient la culture du viol ; car il repose sur l’idée qu’une femme doit forcément du sexe à un homme avec qui elle passe du temps.
Enfin, les médias, notamment le cinéma et la publicité ont un apport non négligeable aux stéréotypes qui constituent la culture du viol. En effet, il n’est pas rare de voir dans ces images, des modèles de femmes qui « réclameraient » d’être violées, ou alors qui ressentent du désir, quand bien même elles diraient non. Ces stéréotypes se traduisent jusque dans le langage courant, où on parle de femme qui se « fait violer », non de femme violée, comme si la victime avait commandité un acte criminel à son encontre.
Finalement, si la culture du viol est à combattre, ce n’est pas seulement parce qu’elle encourage et banalise le viol qui est un crime, rappelons-le, mais surtout parce qu’elle limite le droit des femmes de disposer de leur corps librement, en choisissant comment elles souhaitent exercer leur sexualité, notamment leurs partenaires et le moment d’avoir des rapports sexuels.
La culture du viol (2/5)
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A découvrir le tout début de la série : https://1011-art.blogspot.com/p/thisisnotconsent.html
Et aussi en écho, une oeuvre plus pudique intitulée « Noli me tangere » sur l’inviolabilité du corps de la femme : https://1011-art.blogspot.fr/p/noli-me-tangere.html