De « l’islamo-mania »

Juil 7, 2015 | Critique des médias, Islam | 0 commentaires

Temps de lecture : 5 minutes
Précédemment, je vous avais fait part des perles qu’on pouvait entendre de certaines personnes qui étaient plus ou moins conscientes d’être islamophobes. J’avais ainsi démontré à partir de ces exemples que dans la plupart des cas, ces inepties n’étaient pas dues à de la méchanceté gratuite mais à de l’ignorance.
Ainsi, on peut se demander quelles sont les raisons de cette méconnaissance. On pourrait accuser (à raison) ceux qui ne maîtrisent pas le sujet de ne pas se renseigner correctement. Cependant, on est forcé de constater qu’ils ne sont pas les seuls à blâmer quand on voit le flot trop important d’informations non pertinentes/incomplètes/erronées (rayer la mention inutile) fournies par nos médias de grande audience.
Pour commencer, on a l’utilisation du préfixe « islamo » qui ne veut rien dire mais qui vient polluer de plus en plus de gros titres pour trouver un moyen de définir les protagonistes de faits divers.
paru dans lefigaro.fr, le 22 décembre 2014

paru dans lefigaro.fr, le 22 décembre 2014


paru dans Le Parisien, 12 juin 2015

paru dans leparisien.fr , le 12 juin 2015


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Pour ma part, je ne comprends pas le concept d’ « islamo-délinquance », et encore moins celui de l’ « islamo-psychiatrie » . Le braqueur aurait-il prononcé « Allahu Akbar » avant d’accomplir son méfait ? Qu’est-ce que l’islamo-psychiatrie ? C’est une méthode de soins inspirée par le Coran ? C’est quand le divan du patient est orienté vers la Mecque ? Ou quand le médecin dit Bismillah avant de commencer ?
Pour apprécier ce qui va suivre à sa juste valeur, il est important de rappeler la définition d’un attentat ; à savoir un acte violent destiné à mettre en péril les intérêts et les institutions d’une nation et/ou d’un territoire. On reconnaît un attentat au fait qu’il soit revendiqué par une organisation souvent terroriste.
Ensuite, on a droit à la surenchère et à la spéculation de la part des chaînes d’information en continu au moindre fait divers. En effet, lorsqu’il y a une tragédie, on lui cherche toujours une « islamo-cause ». On peut aisément le notifier dans l’affaire Yassine Salhi, qui a souhaité déguiser en attentat terroriste un règlement de compte avec son patron. Ici, I-Télé parle d’attentat alors qu’il n’y a eu aucune revendication de la part d’organisations terroristes.

Autre exemple avec le crash de Germanwings, où Jean-Pierre Elkabbach interviewe sur Europe 1 Alain Vidalies, secrétaire d’État aux transports et cherche à connaître la nationalité des passagers, afin de savoir si ces derniers étaient des candidats au terrorisme, et donc des suspects potentiellement responsables de la catastrophe.

– Jean-Pierre Elkabbach : « Parmi les 144 passagers victimes de cette catastrophe, il y a 67 Allemands, 45 Espagnols, c’est-à-dire 112. Qui sont les 32 autres ? »
– Alain Vidalies : « Il y a un certain nombre de nationalités, cela a été dit, des Belges, des Anglais, des Turcs, il y a des vérifications qui sont en cours puisque nous sommes à l’intérieur de l’espace Schengen… »
– JPE : « Justement on se disait avec Maxime Switec [présentateur du journal de 8h sur Europe 1] tout à l’heure, comment se fait-il qu’il y avait le nom des passagers mais pas leur nationalité ? »
– AV : « C’est la réalité quand vous prenez un avion à l’intérieur de la France ou à l’intérieur de l’espace Schengen… »
– JPE : « Et il n’y a pas de changement à envisager ? »
– AV : « Écoutez je pense qu’à ce moment-là ça voudrait dire qu’on ne pourrait plus prendre les billets par internet ou d’une manière facile donc je crois qu’il faut réfléchir à ces conséquences… »
JPE : « Dans les noms que vous avez des passagers, il n’y en a pas qui viennent d’endroits où on pourrait soupçonner qu’ils sont en mission suicidaire ? »

(source : Acrimed)
De la même manière, personne n’a voulu prononcer le mot « attentat » lorsque Dylann Roff a assassiné 9 noirs dans une église avec pour seul mobile la haine raciale. Au contraire, certains articles comme celui de la version suisse du site 20 minutes ont même cherché à trouver des « excuses » à ce [mauvais] « comportement » qui ne serait finalement pas [tellement] pire qu’un [banal] crime passionnel.
Évidemment, tous ces exemples ont pour inévitable corollaire la cristallisation des peurs existant autour de l’Islam. A tel point que récemment, une CM a été violemment prise à partie pour avoir publié des recettes orientales à l’occasion du Ramadan en évoquant la convivialité et le partage qui règne durant cette période cruciale pour les musulmans. Un « islamo-bad buzz », donc.
Cet épisode prouve bien qu’aujourd’hui, nul besoin d’être musulman pour être victime d’islamophobie ; il suffit simplement d’éprouver de l’affection ou de la compassion avec tout ce qui se rapproche de près ou de loin de l’islam.
Enfin, pour ne pas faire de procès d’intention, on n’accusera point ici les médias d’être [consciemment] islamophobes (même si on pourrait). Cependant, on peut légitimement se poser la question de l’intérêt de cette « islamo-obsession ». Un élément de réponse serait de dire que tout ce qui se rapporte de façon négative à l’islam en temps de crise économique et identitaire, le tout rythmé par des attentats terroristes, trouve un bon public . Qui dit bon public, dit plus d’audimat, plus de ventes, plus de vues et donc, plus d’argent. Les fins mercantiles de nos médias de références (devenues désormais prépondérantes par rapport à leur devoir d’informer) pourraient donc expliquer au moins en partie cet « islamo-(dés)amour ».
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