De l’arnaque des espaces militants dits “safe”

Août 31, 2018 | Société | 0 commentaires

Temps de lecture : 2 minutes

Dans plus en plus d’espaces militants, et d’organisations politiques et associatives, l’initiative est prise de fixer plusieurs règles afin de supprimer les oppressions racistes, sexistes, classistes, grossophobes, homophobes, ou validistes. En général, on cherche à tendre vers la démocratie directe dans ce type d’organisations et l’idée est de faire en sorte que tout le monde puisse s’exprimer de manière égalitaire, qu’il y ait le moins de hiérarchie possible et que tout travail soit collectif. Il est donc nécessaire de mettre en place un certain nombre de règles plus ou moins rigides. A priori, ce devrait être une excellente chose.
Sauf que dans la pratique, les règles mises en place dans ces organisations, deviennent trop souvent une fin en soi, et non un moyen pour lutter contre les oppressions. Pire, ces règles ne permettant pas la disparition comme par magie des oppressions, elles sont utilisées à mauvais escient, et bien souvent au profit des personnes les plus privilégiées du groupe.
Ainsi, on se retrouve avec des schémas où ce sont toujours les mêmes militants mis en avant (souvent ceux qui ont déjà le plus de privilèges hors espaces militants) au sein de la structure, et où les autres sont obligés de batailler dur pour avoir voix au chapitre, où les règles de la structure sont utilisées pour étouffer les paroles des groupes dominés, voire d’empêcher le débat lorsqu’il est à l’initiative de ces mêmes groupes dominés.
Le pire, c’est que quand des militants d’autres organisations structurées différemment (bien souvent des groupes de dominés en non-mixité) refusent les injonctions aux règles du “safe”, ils sont violemment attaqués sur leurs pratiques et sur leur personne, et la colère légitime due aux oppressions subies devient un prétexte à la violence gratuite, oubliant tout sens éthique et toute notion de bienveillance (ce qui n’est clairement pas safe du tout, au final, il faut en convenir).
Finalement, le “safe” devient une injonction émanant de milieux militants qui se veulent “déconstruits”, mais qui sont bien souvent peuplés de personnes dominantes qui peuvent se permettre le luxe de la déconstruction : en effet, là où la priorité des dominés sera de ne pas se faire agresser au sein de la structure et en-dehors, la priorité du dominant sera “le respect des règles” et “le débat apaisé”. Même lorsqu’une personne dominée brisera la règle pour se protéger d’une agression, on lui rappellera “la règle”, histoire qu’elle reste à sa place de dominée, et qu’elle comprenne que son combat est secondaire au niveau de la structure.

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